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Journal, très court j'espère, d'un SDF de plus
12 décembre 2007

[59] La guerre du logement

Jour 38

Il arrive toujours un moment où la meilleure volonté du monde, se heurte des barrières hérissées de pointes.
Autant pour trouver du travail - si la santé le permet - il s'agit de s'affranchir de la paresse, du fatalisme, de ne pas regarder trop en arrière les mois "d'inactivité", et d'être bien organisé, autant le logement s'affirme de plus en plus comme un privilège, et non plus comme un droit.

En France, on sait tous que la situation tend vers le critique. Surtout dans les grandes villes. Hormis Paris, où l'offre est rachitique par rapport à une demande explosive, il est théoriquement possible de se loger dans toutes villes et cités de France et de Navarre.
Théoriquement.
Parce qu'il y a un truc dans l'air qui dit que tous les locataires sont des enculés en puissance (comprenez des squatteurs qui ne paieront pas leurs loyer) et les propriétaires des victimes prédestinées à être escroquées par la pauvreté ambiante.
Le propriétaire ne dort pas la nuit, il tremble chaque jour de chaque mois de chaque année que le chèque du pauvre-non-propriétaire ne parvienne pas dans sa boite aux lettres, pire encore, qu'il soit rejeté par sa banque.

C'est donc la guerre. Mais une guerre étrange, opposant 2 races qui doivent pourtant coopérer. Et c'est bien souvent l'agence qui fait le filtre entre ces 2 espèces qui, dès le départ, se font la gueule, avant même de se connaître. Bref, la méfiance intestine, la peur du chômage qui plomberait les loyers, la malhonnêté intrinsèque du locataire potentiel, font que la recherche de logement en France est un terrain miné.
Déjà, celui qui est seul de chez seul - ni famille, ni amis - est pratiquement condamné à se voir opposé une fin de non-recevoir s'il veut signer un bail. Et c'est bien ça qui me rend dingue : je voulais à tout prix éviter de faire appel aux autres pour entrer dans des murs, parce que j'estime que mon cheminement matériel, n'a pas à être lié à mes proches.
Surtout sur les questions d'argent, extraordinairement efficaces pour pourrir les rapports humains.

Or, personne n'est à l'abri d'un accident, et je ne vois pas au nom de quoi, untel ou untel, en tant que garant, devrait accepter d'endosser les risques inhérents de la vie. Je ne parle pas du tout de malhonnêteté, mais simplement de malchance. La malchance existe. Il existe des tonnes de raisons pour trébucher, contre son gré. Et le garant devrait accepter d'essuyer les plâtres !!? Absurde ! Surtout que lui aussi n'est pas à l'abri d'accidents !
Le risque zéro n'existe pour personne. Or, c'est ce que veut le propriétaire : le risque zéro.
Le proprio n'accepte pas que la vie elle-même comporte sa part de risque. Bien sur, lui-même est tenu par son crédit, et sa banque, elle-même tenue par machin et encore machin...
Mais enfin, dans ce monde ultra-systématisé, il existe des réalités humaines, morales, ethiques, des urgences liées à l'hiver par exemple, et qui devraient prévaloir sur la peur de l'accident, qui si ça se trouve, n'aura jamais lieu.
Et c'est de pire en pire. L'entonnoir ressemble à un goulot d'étranglement : CDI - hors période d'essai - 3 dernières fiches de payes - avis d'imposition - gagner 3 ou 4 fois le montant du loyer - un garant aux reins solides, sinon plusieurs garants - payer la caution etc.
Ne pas répondre à un seul de ces critères, et on vous claque la porte au nez.

Je n'ai plus de famille derrière moi, mais heureusement, les amis d'enfance, jugeant sûrement ma détermination sincère à m'en sortir, acceptent de partager les fameux risques. Et moi aussi, je le ferais en retour, si un jour le cas se présentait.

Mais je garde quand même, au fond de la gorge, un certain dégoût, une certaine amertume devant tant d'exigences qui frisent l'irrationnel. Il me semble que la chose était plus humaine, pendant les 30 glorieuses par exemple. Que les gens se fiaient plus à leur intuition pour signer un bail. Ce temps est révolu.

Ce soir, j'ai visité un grand T1 Bis à un prix raisonnable (pour Toulouse). 45m² pour 420 € charges comprises. Chauffage au gaz. J'ai essayé de négocier pour entrer au plus vite dans les murs, de lâcher 800 € en liquide, pour dormir dès ce soir, corps déplié. Ma grande angoisse, c'est d'entrer en production (passée la formation) lundi prochain, dans des conditions d'hygiène, et de sommeil déplorables. Sachant que je suis encore à l'essai jusqu'à 3 janvier 2008, j'ai bien peur que dormir dans la voiture soit fatal sur mon évaluation finale.

Rien à faire. Céline, qui m'a fait visiter l'appartement, est aussi mignonne qu'intransigeante.
D'abord des papiers, des papiers et encore des papiers. Après on étudiera votre dossier. Et on décidera après. Aucune possibilité d'arrangement auparavant.

Même s'il fait zéro degrés dehors.

CQFD.

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